dimanche 28 décembre 2008

La vie très, très remplie

Je sais. Des mois sans nouvelle entrée. Quelle horreur. Si je ne suis pas venu pendant tout ce temps, c'est parce que le temps, je n'en avais carrément pas. C'est con d'même.

Je suis déchiré entre le désir de continuer et de vous raconter comment ça se passe (on est exténué, mais les choses vont de mieux en mieux), et l'effort énorme que représente un blogue bien nourri.

(Ma blonde lit au-dessus de mon épaule en ce moment-même. "Ben là, continue!", me dit-elle.)

Alors je n'ai pas le choix, c'est ça?

Ils ont maintenant deux mois et demi. Voici donc, en bref, notre vie.
1-bonheur
2-couches
3-boires
4-vêtements souillés
5-pleurs
6-privation de sommeil
7-répéter 1 à 6 dans un cycle ininterrompu qui vous draine chaque goutte d'énergie qu'il vous reste, tout le temps, sans arrêt, sans pause ni répit. Mais on se dit chaque jour qu'on n'a pas le droit de se plaindre: c'est ce qu'on voulait, et on est extrêmement chanceux. Ils sont beaux comme des coeurs et on est en amour par-dessus la tête.

On se revoit, alors... :)

jeudi 7 août 2008

Propre propre propre

Aujourd'hui, la femme de ménage est venue. J'ai demandé, poliment bien sûr car la qualité de son français tire la moyenne québécoise vers le bas (soyons très diplomates), si elle pouvait laver les planchers. La maison n'est pas exactement un abattoir, mais quand même, voyez-vous, on n'est pas du genre à enlever les souliers à chaque fois qu'on entre. Pas notre genre. (On habite la ville, pas la campagne.) En plus, elle n'était pas venue depuis un mois.

(Permettez-moi une parenthèse sur l'aide ménagère. Pendant des années, je me suis opposé. Des années. Récemment, avec mes tâches qui ont augmenté inversement proportionnellement aux heures de canapé de ma blonde, j'ai cédé. Je dois dire que je n'osais jamais imaginer qu'un lavabo de cuisine pouvait être si brillant.)

Lorsque je suis revenu du travail, ce soir après une journée trop longue comme c'est souvent le cas ces jours-ci, j'ai examiné les planchers. De près. Et là, j'ai eu l'idée d'un concept de "note de passage". La barème de notation pour à peu près tout, dans la maison, va tourner de plus en plus autour des bébés. Parce qu'en regardant le plancher du sous-sol, par exemple, je me suis demandé: "Pourrais-je concevoir qu'un bébé se mette à lécher le plancher tel que je le vois maintenant, là là, à 20h un jeudi soir, dans ce centimètre carré devant moi?"

Bon. Je vous vois lire cette entrée et penser: "Non mais relaxe, un bébé, ça met TOUTTE dans sa bouche, d'un ver de terre à un fil d'araignée en passant par une suce qui traîne dans le sable, tout le temps, sept jours sur sept..."

Oui. Mais quand on n'a pas encore d'enfants, on ne sait pas trop.

Et la propreté n'est qu'une toute petite partie du casse-tête. Lorsqu'ils auront 10 mois, 14 mois, qu'ils se mettront à ramper, grimper, marcher, je vais obséder sur les objets dangereux. J'imagine déjà une maison comme l'appartement du vieux fragile dans Amélie Poulain: des bouts de coussin sur tous les coins de meuble, du tissu ici et là, etc.

Alors dans la liste des choses à faire, on ajoute ceci: "Prévoir, mais ne pas névroser."

dimanche 27 juillet 2008

Et toi?

Ça fait longtemps et je vous resoumets le bonjour. Raison: la vie est bien remplie. Surtout quand la blonde, disons, en fait de moins en moins parce qu'elle est de plus en plus... Comment dire... Immobile?

La semaine dernière, nous avons franchi le cap des six mois. Au bureau, je me fais encore taquiner. Heille, des jumeaux, tu vas en avoir du travail, hein? Ça va pas être facile hein? Héhé! T'as déjà l'air fatigué, mon vieux!

Merci. C'est fou comment la nature humaine a trouvé le moyen, au fil des siècles, de trouver un équilibre absolument formidable de manière à osciller gentiment entre le sympathique et le profondément désagréable.

Bon. Je me plains le ventre plein.

Car au fond, ma blonde et moi sommes vraiment très heureux. Oui, elle est super stressée. C'est normal. Mais cette grossesse, on la voulait, et en général, tout baigne. (Touchons du bois.)

Tout de même, c'est drôle. Je me rends compte avec le temps qui passe que la star, c'est pas nécessairement les bébés qui s'en viennent. C'est ma blonde. Même lorsqu'elle n'est pas là.

Au bureau, les gens n'ont qu'une ligne de questions: pis, comment va ta blonde? Pis comment va la maman? Pis comment vont les nausées?

Heu, merci, ça va. Quant à moi, vous êtes gentil(le) de le demander, je vais pas si mal. Je continue de respirer et j'existe. D'ailleurs, collègue, je me tiens devant vous et j'occupe environ un mètre carré si je bouge un peu mes bras. Même, imaginez-vous, j'ai des "sentiments" et des "impressions" et des "choses à dire".

Quelle ne fut pas mon étonnement cette semaine lorsqu'une collègue m'a demandé comment j'allais. Sans blague, je n'ai pas su quoi répondre sur-le-champ.

Je m'en voudrais toutefois de ne pas reconnaître une chose. Ils ont raison. Ces jours-ci, je n'ai, en effet, qu'un rôle de soutien. La star, celle qui fait tout le travail, c'est la future maman...

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Mise à jour 20 minutes plus tard: "Moi, je te demande comment tu vas, non?", me dit ma blonde. C'est vrai. Mais je ne parlais pas de toi.

jeudi 5 juin 2008

Y'en a tu dans vos familles?

Il y a des choses que l'être humain saisit mal dans le détail. Il comprend l'essentiel, mais ne lui demandez surtout pas d'entrer dans le vif du sujet, il ferait un court-circuit neuronal. Des exemples? L'impôt, la géopolitique du Moyen-Orient, la crise alimentaire.

Un autre: la procréation.

Ainsi donc, comme dirait le quidam, l'annonce d'une arrivée imminente de deux nouveaux êtres dans ce monde suscite souvent la même question: y'a tu des jumeaux dans vos familles? L'usage de l'adjectif possessif "vos", je me sens presque niaiseux de le dire, traduit une profonde incompréhension du phénomène.

Et si, par exemple, je répondais: "Ouein, du bord de mon père, il y a trois paires de jumeaux pis deux paires de triplets! Mais du côté de ma blonde, eh! Rien du tout! C'est fou hein? Donc bref, moi aussi je vais avoir des jumeaux..." Les gens verraient-ils l'illogisme? Certains, probablement pas.

Pas compliqué: si c'est des jumeaux, soit que l'embryon s'est divisé en deux très tôt dans le processus, soit que la fille a produit deux ovules et qu'ils ont chacun été fécondés par un spermatozoïde différent. LE GARS N'A RIEN À VOIR.

Mais à entendre les questions qui me sont balancées, on croirait que la chose se transmet de génération en génération, d'un côté ou de l'autre de l'arbre généalogique, comme une sorte de maladie qui sème le bonheur.

Je pense du coup à d'autres incompréhensions collectives, d'autres légendes urbaines et mythes absolument incongrus... Ne vous baignez pas après avoir mangé, vous aurez des crampes. Si vous approchez un pissenlit de votre menton et que votre peau prend un aspect jaunâtre, vous faites souvent pipi au lit. L'être humain n'utilise en réalité que 10 % de son cerveau, etc.

Quand même, je les regarde dans les yeux et je leur donne la seule réponse scientifiquement valable: "Oui, du côté de ma blonde."

Le deux poids, deux mesures

C'est fait. Il y a quelques semaines déjà, j'ai annoncé à mes supérieurs et à mes collègues que ma blonde est enceinte. "Bravo bravo", "Félicitations...", "Des jumeaux? Oh pauvre toi!", etc.

Un des patrons haut-placé dont le travail est de "gérer" le personnel -- ce qu'il fait plutôt mal, mais que voulez-vous, on n'a pas tous le don d'interagir chaleureusement avec d'autres êtres humains -- ne m'a pas félicité IMMÉDIATEMENT, comme ce fut le cas avec les autres. Ça lui a pris cinq ou six secondes, après un silence que j'ai noté bien méticuleusement. Dans sa tête, j'ai vu tout de suite qu'il pensait au casse-tête que le congé allait créer pour lui.

Sachez que du coup, j'ai mis les cartes sur la table: voici, chers patrons, ce que la loi prévoit, et voici le congé que j'entends prendre. J'ignore comment ça se passe en France, mais au Québec, une loi adoptée en 2006 permet au couple de se partager un an de congé parental, comme bon lui semble. C'est génial. C'est le genre de chose qui donne aux gens de gauche l'impression que tout n'est pas perdu en ce bas monde de cash et de conneries. Alors je prends plusieurs, plusieurs, plusieurs mois.

Depuis quelques années au Québec, on vit une sorte de mini-mini-baby-boom. Rien de majeur, mais dans les milieux de travail, les congés de maternité se sont multipliés. Y compris le mien. Les filles partent pour un an, systématiquement. Les gars, deux ou trois mois. Et les patrons ne disent rien. Ils n'ont pas intérêt à sourciller; ils se feraient lyncher, tout simplement.

Mais étrangement, pendant quelques jours je me suis senti coupable. Personne n'est irremplaçable, mais quand même, un long congé de ma part va plonger mes collègues dans la merde. Jusqu'aux genoux, disons. C'est ce que je me disais. Jusqu'à ce que je revienne à la raison: si mes collègues féminines partent un an, pourquoi est-ce que je ne pourrais pas partir six mois?

Et je me suis trouvé tellement niaiseux de m'être senti coupable, vous n'avez pas idée.

jeudi 22 mai 2008

"J'ai l'air enceinte"

Oui, je sais. De longues semaines entre les entrées sur le blogue. J'ai honte. Très, très honnêtement. Si je pouvais écrire à tous les jours, je le ferais. Mais c'est impossible. Trop de choses dans la vie.

Dimanche après-midi, donc, dans un centre d'achat de l'ouest de Montréal. Boutique de maternité tout ce qu'il y a de plus "peuple". Une gérante ultra sympathique, des vêtements pas si mal, mais rien de chic. On essaie des jeans -- quand je dis on, c'est ma blonde, on s'entend là-dessus hein -- on essaie des jeans donc.

-C'est-tu beau?
-Pas pire. En fait c'est très bien.
-Ouein mais j'ai l'air enceinte.
-Heu, c'est ce que tu ES.
-Ouein. Ouein c'est vrai.
-(...)

Vous venez de comprendre, en trois lignes, la complexité du cerveau féminin. Bref, à la fois être féminin, svelte et avec les courbes à la bonne place, mais en même temps, pas nécessairement être trop... comment dire... grosse? On veut bien, mais la grossesse entraîne tout de même une certaine prise de poids dans la région du milieu. Me semble que c'est évident.

Ce qui m'amène à l'évidence prochaine. Celle de moi qui annonce, dans mon milieu de travail, la grossesse de ma blonde. Vous vous en doutiez peut-être. Je réserve ce passage de la vie pour la prochaine entrée sur le blogue. Je pense qu'il y a matière à, comme on dit en latin.

samedi 3 mai 2008

C'tu naturel?

La décision de recourir à une fécondation in vitro pour avoir un enfant -- ou des, c'est selon -- est mûrement réfléchie. Vous y avez pensé des mois durant, vous avez pesé les risques, vous avez décortiqué la mécanique jusque dans ses derniers retranchements subatomiques n'est-ce pas, vous savez comment ça va se passer, les traitements, les injections, les horaires, etc.

Alors voici, je vous annonce en GRANDE PRIMEUR MONDIALE -- vous l'avez lu ici en premier, ne l'oubliez jamais -- que ce n'est pas tout. Il y a la mécanique, mais il y a aussi l'interprétation. Celle des autres, j'entends. Extrait.

-On vous annonce qu'on, c'est à dire pas moi mais elle, hein, les hommes ça sera pour plus tard, hum hum... est enceinte!
-Oooh! Nooooooooooooooooooooooooon! Félicitations!!! C'est pour quand?
-Genre l'automne... Mais c'est pas tout.
-Hein?
-Y'en a deux.
-Wouaaaaaaa! Wow!!!!! Heille ça c'est l'fun! Ça va être d'la job hein ça!!! Wow! Heille super cool!

(Généralement, ici la conversation arrive à la croisée de deux chemins. Soit vous continuez à imaginer la charge de travail inhumaine que représentent deux nouveaux-nés arrivés dans la maison en simultané, soit l'interlocuteur passe à une prochaine question, beaucoup plus pertinente que toute forme de considération pop-philosophique sur l'art d'être un parent responsable, disons.)

-Des jumeaux... Hmm. C'tu naturel?

(Ça se corse. Ici, vous avez deux options. Le choix de réponse, préférablement, doit avoir été validé en couple au préalable.

1-Vous pouvez jouer cartes sur table, vous mettre à nu et dire qu'en effet, Ginette, c'est pas naturel. Vois-tu, Ginette, moi j'ai un problème. Je sais pas comment c'est arrivé, je sais pas quand, j'étais peut-être ti-cul pis je me suis baigné par hasard dans un marécage radioactif, mais j'en ai un et apparemment je peux rien y faire. Kesse tu veux, y'a des choses comme ça qui sont incontournables, qui vont au-delà de la raison. Alors on a fait ça dans un labo, on a fini par mettre dans ma blonde deux embryons, ma tite Ginette, pis les deux ont collé. Mais on n'est pas ici pour discuter philo, hein Ginette?

2-Vous faites comme si rien n'était. Oui, bien sûr que c'est naturel! Hé wô! Non mais tsé! Des jumeaux, on en a PLEIN DANS NOS FAMILLES, tous bords tous côtés!)

Les gens ont le droit de poser la question. Certains osent, d'autres le pensent tout bas. Mais au fond, que ce soit naturel ou pas, ça change quoi? Hein? Ça change quoi? Ce qui va sortir, c'est pas des robots, crisse, c'est des bébés.

lundi 28 avril 2008

Membre à vie

La vie a cette maudite habitude d'imposer à l'homme (et à la femme) une mécanique bien à elle, qu'on l'aime ou non (la vie, mais la femme aussi, non mais tsé). L'équation, que je vous résume brièvement pour éviter que vous ne vous endormiez dans les 13 prochaines secondes, ressemble à ceci: GPG=X.

Autrement dit, on passe du général (G) au particulier (P) au général (G). Le X est le résultat. Vous ne comprenez toujours pas? La plupart du temps, moi non plus. Mais je vous donne un exemple concret.

Avant-hier, nous sommes allés manger avec des amis. Ils ont un bébé d'un an. Ils ne savent pas que ma blonde est enceinte. Au préalable, je devais appeler pour fixer l'heure du rendez-vous.

Moi: Alors on se dit quoi, 11h?
Amie: Ben, quelle heure est-il, en ce moment?
Moi: 8h30.
Amie: Ok, ben en tout cas, on était debout à 6h30 hein... Alors on a l'impression d'être déjà en après-midi.

Sur le coup, je me dis que ça ne se peut pas. On ne leur a jamais dit qu'on est infertile, mais on parie assez fort qu'ils s'en doutent. Or je cherche le sens. Si le commentaire est une blague, si c'est une réflexion de nature philosophique sur l'absurdité du temps et ses conséquences sur le vivre du surmoi-- c'est sûrement pas ça, entendons-nous --, ben là je ne la comprends pas du tout.

On sait ben, quand t'as pas d'enfant, tu sors du lit le plus tard possible, t'es essentiellement une larve, vois-tu. Un parasite, voilà ce que tu es, un gros con stérile dans une société où l'absence de procréation est un non-sens, parce que le but est d'avoir des familles, de générer de la progéniture pour qu'on les entraîne à consommer des téléviseurs géants, qu'on les montre aux voisins et qu'on vogue vers le progrès, vois-tu? Alors si t'as pas d'enfant, tu te lèves tard et tu ne comprends pas, c'est tout.

Non, je vois pas.

Le pire, c'est que la veille, le gars du couple a dit quelque chose d'un peu con à ma blonde, là aussi dans la veine du "tu verras, quand tu auras des enfants".

Une fois au resto, on était tellement en crisse (désolé pour le Québécisme, les Français) qu'on leur a même pas annoncé.

Tout ça pour revenir à l'équation. La situation de départ, c'est à dire le général (G), c'est qu'on est en situation d'infertilité. Le particulier (P), c'est que la science moderne nous a permis de tomber enceinte. Or suffit d'une étincelle pour que soudainement on quitte le particulier pour prendre un peu de recul. Nous revoilà en général (G), avec une vue d'ensemble, et on se rend compte d'une chose fort simple (X): même si ta blonde est enceinte de jumeaux, tu fais encore partie du Club des infertiles, mon vieux.

lundi 14 avril 2008

Festival Sons et Lumières

La présence d'une fille enceinte dans mon entourage immédiat, nommément ma blonde, génère une quantité d'anecdotes spectaculaire, tant au chapitre des émotions (lorsqu'on a constaté, autour de la 8e semaine, qu'elle avait perdu un peu de poids) que des surprises d'ordre purement corporel (je vous laisse deviner, mais ça rime avec "omir", qui n'existe pas mais que j'utilise quand même).

Comme ce soir, par exemple. Elle arrive du travail. J'entends la porte. Je monte dans la cuisine.

-J'ai presque vomi dans l'auto.
-Hein?? Tu AS vomi? (je me vois déjà en train de passer deux heures en train de frotter le siège du passager)
-Presque.

Ou bien au moment du repas. Elle a des nausées, mais le médicament qu'elle prend depuis quelques semaines lui a redonné le goût de manger, parfois assez violemment d'ailleurs. Remarquez, le jour, je ne suis malheureusement pas là pour la voir courir au casse-croûte à toutes les demi-heures, mais je crois comprendre que ça y va par là, comme on dit au Québec.

Cet appétit renouvelé, combiné à des séances d'engouffrage (j'ai pas le dictionnaire sous la main, désolé chers puristes) de bouffe, donne lieu à toutes sortes de choses. Le plus souvent, c'est un rot, assez puissant dans la mesure où on soupçonne à travers la manifestation sonore un fond liquide.

D'ailleurs, ce soir au moment du massage après la piqûre, j'ai annoncé mes couleurs.

-Je vais faire une entrée ce soir. Ça fait longtemps. Je vais l'appeler "Festival Sons et Lumières".
-Tu devrais appeler ça "Sons et Liquides".

Et elle a souri. Elle souffre. Au moins on peut en rire un peu. J'ai bien dit "un peu". L'important, c'est que dans une semaine et demie, on sera à 12 semaines. Ce qui veut dire une chose: fini les nausées!

mercredi 2 avril 2008

L'agenda

Je n'ai pas d'agenda électronique. Plutôt, le mien est fait de papier, et un seul coup d'oeil cette semaine donne des frissons. Les journées sont bien chargées. Aujourd'hui, par exemple, j'ai eu l'impression de courir toute la journée, un peu comme une poule sans tête. Je suis rentré à la maison vers 20h30, après avoir fait des courses assez volumineuses.

Ma blonde avait déjà pris une bouchée. De plus, ses nausées l'empêchent de faire quoi que ce soit dans la cuisine. J'ai donc fait le souper -- quelque chose de sommaire, on s'entend, car les hommes sont généralement paresseux lorsqu'il faut préparer de la bouffe pour des raisons purement alimentaires, en fait ça finit souvent par être des pâtes -- et là, vers 21h58, j'ai enfin l'impression d'être bien installé dans ce qui s'apparente à une soirée... qui se terminera toutefois vers 23h15, car dodo.

On dit souvent que des journées de 25 heures seraient bien commodes pour quiconque a besoin de plus de temps libre. Les plus cyniques disent qu'elles ne feraient qu'ajouter une heure de travail, mais personnellement, j'essaierais quand même.

On dit aussi que le temps, c'est de l'argent. Si c'est le cas, je suis en faillite. Ces temps-ci, il n'y en a pas assez.

Comme on dit au Québec, j'ai un ti-peu la chienne (pour les Français: avoir peur). En fait, la chienne, non. C'est un peu fort. Disons que j'essaie d'imaginer le jour, après l'accouchement, où il y aura dans la maison non pas deux personnes, mais QUATRE. Le temps sera une denrée rare, encore plus que maintenant.

Aurai-je le temps de lire? De regarder le téléjournal? De respirer?

lundi 24 mars 2008

Le déni

Enfin.

Des excuses très longues et accompagnés de pirouettes aux lectrices (et lecteurs) qui se demandaient si quelque chose d'horrible nous empêchait d'écrire. Nous revoici donc après un petit périple à l'extérieur du pays. On est revenu sains et saufs. Et parce qu'on s'ennuyait trop de cet hiver de con qui n'en finit plus au Québec. Non mais, puisqu'on a la chance de vivre quelque chose d'historique...

Aussi, je suis en déni. (Ma blonde le sait, on ne s'inquiète pas.)

Pour ceux qui viennent de se joindre à nous, je vous explique. Après plus de deux ans d'efforts inutiles côté procréation, ma blonde et moi vivons quelque chose de majeur. On avait des embryons congelés. On les a fait transférer. Et boum: elle a des symptômes assez violents comme des nausées, une sensibilité extrême aux odeurs, des appétits variables, des coups de fatigue soudains. Nous sommes allés à la Clinique pour une échographie la semaine dernière. Pas un, mais DEUX coeurs qui battent. On voit tout ça à l'écran. J'étais ému, c'est le moins qu'on puisse dire.

Pour des êtres humains normalement constitués -- c'est à dire un groupe de gens dont je ne fais probablement pas partie --, ces choses seraient plus que suffisantes pour conduire à une conclusion simple, évidente et claire: elle est enceinte.

Mais voyez-vous, mon cerveau -- un cerveau de gars, on s'entend, donc limité dans ses capacités d'abstraction -- ne fonctionne pas comme ça. Je fonctionne un peu sous l'ancien régime. J'ai besoin d'un ventre. Un gros ventre qui gonfle. Ce qui n'est pas le cas pour l'instant.

"Je comprends pas. Pourtant, t'as vu toutes les étapes, et là, tu me vois dans mon état. Je penserais pas que tu serais comme ça", viens de me dire ma blonde au moment de se faire border. Elle est exténuée. Et puisque je voulais faire une entrée sur le blogue, me voici.

Étrangement, j'ai déjà vécu une forme de déni mais c'était au DÉBUT de toute cette histoire, au moment du diagnostic. Le choc était si gros que la trame narrative des semaines qui filent avait soudainement quelque chose d'irréel. Comme un coup de poing au ventre qui nous fait perdre la notion du temps et du concret.

Mais pas de doute, des symptômes, il y en a. Les désirs de bouffe qui changent d'une demi-heure à l'autre, par exemple. Difficile à suivre, surtout quand on prépare quelque chose de précis pour le souper. Je m'ajuste en conséquence.

Hier soir, mon beau-père a profité d'un mini-moment seul avec moi dans la cuisine pour me glisser un conseil. C'était à la blague, bien sûr, mais impossible de penser qu'il n'y avait pas aussi une tranche de sérieux. "À partir de maintenant et pendant sept mois", m'a-t-il dit, "tu dis toujours oui".

Retour

Il y aura une entrée ce soir...

samedi 8 mars 2008

De retour après cette pause

La vie étant ce qu'elle est -- une course à obstacles saupoudrée de tempêtes de neige et un peu beaucoup de travail --, il a été difficile d'écrire au cours des derniers jours, et je m'en excuse. Non mais, vous entretenir pendant quelques mois sur mes petits états d'âme masculins puis disparaître du jour au lendemain, pff, ça prend du culot hein? Non mais y s'prend pour qui???

Alors voici. Tout semble indiquer, selon une récente visite à la Clinique, qu'il y en a deux. Ma blonde a des symptômes assez puissants, merci. On n'arrête pas de se dire qu'il est encore très tôt dans le processus, qu'il faut toucher du bois, etc. Nous lisons tous, tous, tous vos commentaires avec attention et ça nous fait chaud au coeur. Nous vous souhaitons aussi que ça fonctionne.

Au risque de soulever l'indignation générale, je vous indique cependant qu'il me sera impossible de bloguer au cours des prochains jours car on ne sera pas à la maison. On se parle au retour et on redémarre le blogue...

samedi 1 mars 2008

Verdict préliminaire

Nous voici à la croisée des chemins, en quelque sorte.

Dit simplement: la prise de sang montre un beta hcg élevé. Ce qui, en termes faciles à comprendre pour des gens comme moi, signifie que les DEUX embryons congelés ont possiblement décidé de s'implanter. Choc.

"Dis leur donc que je suis contente et affolée en même temps", me dit ma blonde à l'instant. À Montréal, il est 23h18. Depuis hier, elle est très, très nerveuse. En fait, on a ici une situation de montagnes russes: une minute tout va bien dans sa tête, la minute suivante c'est le bordel. Elle vit exactement ce qu'elle a lu sur d'autres blogues, à savoir qu'un résultat positif n'amène pas nécessairement une effusion de joie.

Parce qu'au fond, il faut savoir deux choses.

1-À l'automne, la première FIV avait fonctionné "à moitié". Un test pipi s'était révélé positif. Un deuxième test pipi était déjà plus pâle. Et à la prise de sang, le hcg était carrément anémique. L'embryon avait tenté de s'implanter, en vain.

2-Un test sanguin positif ne signifie pas qu'il faut sortir le Champagne et le cidre désalcoolisé. Il y a encore beaucoup de chemin à faire et rien n'est assuré. (Touchons du bois.)

Combien de fois a-t-on reçu un courriel avec, en fichier joint, l'image d'une échographie à 12 semaines. On vous annonce que "HEILLE TOUT LE MONDE, VOICI NOTRE PROGÉNITURE!!!!111!!" Quand ça se passe naturellement, c'est si facile, si simple. Ils ont commencé à se fréquenter. Un café ici, un cinéma là. Et un jour, POUF! Enceinte. Trois mois plus tard, vous recevez le courriel.

Non, quand on est infertile, ça ne se passe pas comme ça. L'insoutenable légèreté de l'être n'est pas. Pour vous dire, et je me sens presque mal d'écrire ça, on trouve le moyen de douter encore jusqu'à l'échographie, prévue dans deux semaines.

Une chose est sûre, comme dit ma blonde. Et c'est d'ailleurs ce qu'on doit retenir: les transferts d'embryons congelés, ça peut fonctionner.

On se croise encore les doigts, et merci pour les petits mots doux que vous avez laissés au fil des jours...

jeudi 28 février 2008

L'attente

Pour ceux et celles qui veulent savoir si la "mayonnaise a pogné", comme on dit, je n'ai rien à annoncer pour l'instant. On n'a pas encore subi le test sanguin. Ne vous inquiétez pas, aussitôt qu'il y aura quelque chose...

Remarquez, il n'est pas exclu que je vienne écrire même si on n'a pas encore les résultats. Au sujet de l'attente, par exemple.

samedi 23 février 2008

Les symptômes

C'est un de ces mystères de la vie. Franchement, j'aime mieux pas trop en parler, ça pourrait remuer des choses cosmiques. Ça pourrait jouer avec les astres et modifier le cours de l'histoire, genre que demain notre premier ministre Harper deviendrait charmant, le Canadien de Montréal gagnerait la Coupe Stanley (une affaire de hockey, chers Français) et Sarkozy annoncerait qu'il s'appellerait désormais "Nicolas Bruni".

Je vais vous parler de "symptômatisme parallélique". Ne cherchez pas sur Google. Je viens de l'inventer.

Ça se passe l'automne dernier. J'avais fait de l'exercice la veille, en fait de la musculation. Rien d'énormément exténuant, mais suffisamment intense, comme c'est souvent le cas, pour me donner les habituelles douleurs musculaires du lendemain. Les pectoraux en feu, je vous dis. Passons sur les détails. De toute manière, on n'a pas de photos. (Ma blonde risque de trouver ça déplacé, mais bon.)

Bref, j'annonce à ma blonde que j'ai mal. Il est 23h. Rituel habituel.

-J'ai mal.
-[...]
-J'ai mal aux pectoraux.

À ce moment précis, voyez-vous, je ne cherche pas d'empathie. (En gros, comme si souvent dans la vie, je lui livre une information, et elle fait ce qu'elle veut avec. Un peu comme lorsque je lui annonce que le gardien de but du Canadien va mal, ou que demain je vais pelleter la neige.) Or, elle dresse les oreilles... Voyez-vous, on a commencé les injections de progestérone la veille, et elle a mal. Les seins en feu, qu'elle me dit. Passons sur les détails. De toute manière, on n'a pas de photos.

-T'as mal aux pectoraux? Eh ben. Moi j'ai mal aux seins. Bizarre hein?

Quelques jours plus tard, j'ai mal au ventre. Le petit manège recommence. Il est 23h, blablabla, et je lui dis que j'ai mal au ventre.

-Ah oui? Tiens, moi aussi, j'ai des crampes!

Et c'est arrivé quelques fois comme ça. La vie nous joue des p'tites blagues pour voir si on porte attention. Des p'tits mystères et boule de gomme, juste pour rire. Ça vous arrive?

Au chapitre des mystères, on en vit plusieurs dans mon registre de statistiques Google Analytics, qui voit d'où vous arrivez lorsque vous atterrissez sur le site.

Une personne, dont j'ignore l'identité et que je ne suis pas certain de vouloir connaître, remarquez bien, est arrivé sur le site en ayant tapé ceci dans Google: "comment voir la bite d'un gars". Je ne blague pas. Elles sont partout, les bites, Ti-Coune, partout. Elles t'entourent et tu es encerclé(e). Il (ou elle, disons-le) s'était trompé(e), je pense: les stats montrent qu'il ou elle est resté(e) sur le site ZÉRO SECONDE. Un autre est arrivé en cherchant: "des pensées pour les gars qui mentent aux filles". Encore là, il n'est pas resté.

Le meilleur est probablement celui-ci: "que peut faire un enfant comme tâches ménagères?"

Ouein. Pour l'instant, nous, disons qu'on en est encore à l'étape "que peut faire un embryon comme tâches ménagères?"

mercredi 20 février 2008

De l'art d'éviter de faire pleurer les gens

Rebonjour...

Voilà, paraît que je fais brailler les gens, ce qui n'est évidemment pas le but du blogue puisque bien franchement, j'aime mieux raconter des niaiseries -- les miennes, de préférence, et croyez-moi elles sont légion -- et faire sourire. (Ma blonde craint que les lecteurs d'outremer ne saisiront pas le sens voulu de "brailler". Au Québec, ça veut simplement dire "pleurer". Compliqués, les blogues intercontinentaux!)

Le transfert d'embryons congelés, mardi matin, s'est très bien déroulé. Les deux embryons se portaient à merveille lorsqu'on les a ramenés à la température de la pièce. Cependant, on a failli mourir dans un taxi en se rendant à la Clinique. Le chauffeur a fait une manoeuvre un peu étrange pour atteindre le stationnement. Mais puisqu'on a survécu, faut-il en parler?

Test sanguin dans une semaine et demie, donc.

D'ailleurs, on a vécu un moment spécial dans la petite pièce d'attente. Spécial dans le sens de "on s'est rendu compte que ça fait longtemps".

En gros, ça ressemble à une chambre d'hôpital. Une fenêtre sur quelques arbres. Et des magazines, dont "Créons des familles", publié par l’Association canadienne de sensibilisation à l’infertilité (ACSI). Ne me demandez pas si l'ACSI fait de bonnes choses: honnêtement, je n'ai jamais entendu parler de cet organisme, ce qui équivaut, venant de la part d'un infertile, à un échec cuisant. Avez-vous déjà entendu parler du MégaClub Intergalactique de Tricot en Laine d'Acier, basé à Montréal? Même chose.

On prend le magazine et on le feuillette. C'est le genre de magazine, voyez-vous, où toutes les photos mettent en scène des gens très beaux (les cheveux, les abdos, des seins comme ça), mais infertiles et apparemment si proches d'un genre de geste suicidaire que la seule chose qui leur vient à l'esprit est de se mettre la tête entre les mains. Sans blague. Parfait pour nous, ça. Idéal pour nous remonter le moral!

-Tiens, regarde le magazine.
-Ah ben oui.
-Regarde... [ma blonde me pointe la manchette qui dit "Sexuality, sorrow and the infertile male".]
-Ouein...
-Attends. Me semble qu'on l'a déjà vu, ce numéro-là. C'est quand? [elle vérifie]. Ben oui, automne 2007.
-Ben oui, me semble que... on l'a déjà vu hein?
-Eh ben! Heille ça fait si longtemps qu'on vient ici qu'on connaît les vieux magazines...

À part de t'ça, comme on dit au Québec, ben, c'est la vie qui continue. On se croise les doigts mais il faut être réaliste.

D'ailleurs, à cet égard, ma blonde fouillait le web pour des statistiques sur les transferts d'embryons congelés. Il y en a, mais pas des tonnes.

Dans une des études sur lesquelles on est tombé, il y avait plusieurs catégorie, dont une qui ventilait les résultats pour femmes de plus de 42 ans. (On est début trentaine.) Dans une des catégories, le taux d'implantation d'un transfert avec un seul embryon, si je me souviens bien, était inférieur à 2 %. Je lui signale mon étonnement. Le chiffre m'apparaît bas.

-Wow, regarde cette catégorie-là.
-Ouein ben 1,7 %, tsé, c'est un peu comme les chances d'implantation quand on baise, nous autres.
-Hmm. En effet.

Sur une note plus légère, Google Analytics permet de constater certaines choses. L'une d'elles, c'est qu'un internaute a découvert mon blogue en tapant ceci dans Google: "des pensées pour les gars qui mentent aux filles".

Eh ben.

Mauvais schmilblick, mon homme. (Dans les commentaires, une des lectrices m'a appris l'existence du mot "schmilblick", que j'utilise aujourd'hui pour faire intelligent mais en sachant très bien que les Français risquent de rire de moi pendant trois mois.)

dimanche 17 février 2008

L'admiration

Et si on parlait douleur?

Vous savez, cette petite douleur intense ressentie au moment de constater que votre doigt laisse saigner ce mince filet rouge? Souvent, c'est 10, 25, 45 minutes plus tard. De toute évidence, quelque chose s'est passé pendant que vous refaisiez le monde au téléphone. Des gens très, très importants à l'autre bout du fil. Finance, politique... Et puis blablabla, oui oui oui, ceci cela... Tiens, excusez-moi, je me suis coupé sur un bout de papier... Ayoye... Non mais, quel métier dangereux je fais, hein! Ayoye, je saigne!! Non mais comprenez un peu, là!! Collègues!!! Quelqu'un, amenez-moi un PLASTER!!!!! (pour les Français, le Québécois que je suis vous offre cette traduction sans frais: un sparadrap)

Cette douleur, c'est rien. Du moins, rien lorsqu'on la compare avec ce que vit ma blonde depuis quelques jours.

Je vous fais un topo rapide. On a des embryons congelés depuis l'automne. Mardi matin, on en fait transférer deux. Le traitement préalable exige que la fille prenne des doses d'estrogène et de progestérone.

Estrogène=pilules. Progestérone=injections intramusculaires dans le fessier. Donc seringues plutôt longues.

Le problème, c'est que la maudite progestérone est dans une huile de sésame que ledit fessier (celui de ma blonde, très beau si je peux me permettre, mais sensible ces jours-ci. Bon, elle risque de ne pas aimer que je dise ça.) absorbe plutôt mal. En fait, l'huile semble se garer dans la fesse et fait la fête pendant quelques heures, sur place, sans bouger. En conséquence, la fesse gèle au complet, ça fait mal et ma blonde capote (le verbe capoter, au Québec, est extrêmement versatile et signifie notamment "perdre la tête").

Résultat final: elle ne dort pas. Or, comme bien des gens, ma blonde travaille. Elle a un boulot très chargé, qu'elle aime bien, mais pour fonctionner minimalement, comme vous et moi, n'est-ce pas, elle doit dormir.

Pour minimiser les effets, on a tout un rituel. Avant, on prépare le muscle avec une sorte de sac de fèves qu'on chauffe au micro-ondes. Après la piqûre, je masse pendant 10 minutes. Pendant ce temps, on jase de choses et d'autres. "Puis, au téléphone tantôt, c'était ton papa? Il va comment?" Après avoir cherché des solutions sur internet, à l'automne, on a lu que ça aidait beaucoup. Et puis oui, ça aide.

Mais bon. On vient de REcommencer les piqûres. Depuis quelques jours, ma blonde boite. C'est comme si ses fesses avaient oublié. Donc, extrait vécu hier ou avant-hier (les jours se suivent et dans ces situations-là, tout devient flou pour moi). Il est 6h du matin. Je me réveille pour une raison quelconque.

-Hmph, iiiich.
-[...]
-Hmph.
-Ça va tu?
-Je n'ai pas encore dormi.
-Hein??? Y'est 6h!
-Je l'sais. Mais ça fait trop mal.

Pas besoin d'un dessin. C'est son cul. Ça lui faisait si mal qu'elle ne dormait même pas. Les gars, je sais pas si vous êtes comme moi, mais quand elle a dit ça, mon coeur s'est déchiré. Elle ne dormait PAS! DU TOUT! Soudain, j'avais MAL, moi aussi. Comme à l'automne.

Comment être insensible à ça? Suis-je le seul gars à se sentir mal lorsque c'est la fille qui se tape tous, mais vraiment TOUS les traitements? Pourtant, c'est moi qui suis infertile, non?

Chères lectrices, vos hommes ne le disent peut-être pas, mais je parierais qu'ils apprécient tout ce que vous faites... Et subissez.

Il est tard. Je reviendrai un autre jour, sans faire pleurer les lecteurs, sur la notion de culpabilité.

Sur ce, souhaitez-nous bonne chance pour mardi matin!

jeudi 14 février 2008

De partout

Lorsqu'on dit que l'infertilité se vit partout, c'est au littéral: vous venez littéralement des quatre coins du monde pour lire mon site, lequel, soit dit en passant, est déjà en nomination pour le prix Spermo de l'Institut masculin de New York, catégorie "meilleure description d'un dépôt". (Ma blonde ne la trouve pas drôle. C'est à qui, le blogue?)

Blague à part, vous êtes de partout. Du Québec un peu, de France beaucoup, mais parfois des États-Unis, de la Suisse ou des Pays-Bas. Outre le cumul de statistiques élémentaires sur le taux de fréquentation, le site permet d'identifier la région d'où arrivent les lecteurs.

Tenez, depuis le tout début du blogue, les Français(es) vous êtes plusieurs de Lyon, vous et vos brasseries que je rêve de voir un jour. Vous êtes aussi de Paris, où ma blonde et moi retournerions deux fois par année pour le reste de nos jours si nous le pouvions, pour cuver un Saint-Émilion sur la Place des Vosges. De Provins, qu'on a visité il y a quelques années et trouvé ça charmant. De Vanves. Tiens, connaissais pas Vanves.

Cliquez sur la carte:

















Les Québécois(es), vous êtes de Montréal, d'Outremont (je sais, je sais, c'est pas une ville, mais bon), de St-Romuald, de Thetford Mines, de Greenfield Park, de Sainte-Foy. J'en oublie sûrement. D'Acadie aussi, Moncton!

Ce qui m'amène à la réflexion suivante: si l'infertilité est un problème si répandu, pourquoi est-il si difficile d'en parler?

Prenez, par exemple, tous ces amis que vous avez perdu en cours de route. Tous ces mois où vous essayiez de faire concorder la seconde précise de votre ovulation avec un certain travail, heu, disons, physique de votre homme, ben vos amis, eux, y faisaient des bébés. Plusieurs, plusieurs bébés. Juste comme ça, on arrête la pilule et hop la vie!, pouf ça pleure 9 mois plus tard. Sortez les cadeaux!

"On ne dort plus, c'est fou!", qu'y vous racontent. Et ça parle de caca. Et ça parle de pipi. Et ça parle de petits boutons. "A-t-il fait son rot?", qu'on entend entre deux discussions sur le dernier album de Chose Truc et la politique étrangère. Et là, vos soupers d'amis bien arrosés qui se terminaient avec un départ en taxi à 1h du matin, ben y se terminent à 14h parce que devinez quoi: vos soupers, c'est désormais des brunchs. Sans alcool. Parce que celles qui n'ont pas encore de bébé dans le monde extérieur en traînent un dans le ventre. Sauf ma blonde. Et vous, mademoiselle qui lisez ce blogue.

Alors ces amis, donc, avec leurs enfants. Parfois, l'éloignement commence avant même la naissance. En fait, à partir du jour où la fille vous annonce qu'elle est enceinte. À partir de ce jour-là, ben disons qu'il y a un malaise, non? Attachez-vous, le malaise en a encore pour PLUSIEURS MOIS à grossir, pour vous rappeler à chaque fois que vos p'tites baises les jambes en l'air pour bien que ça reste en place, ben ces baises-là, ça ne fonctionne pas, Monsieur l'Étalon.

Le malaise perdure jusqu'au jour où il disparaît, tout simplement parce que le couple d'amis, lui aussi, disparaît. Il est dans sa bulle, le couple. Remarquez, on le comprend. Qui ne serait pas complètement absorbé par l'arrivée d'un enfant?

La question, la vraie, est celle-ci: lesquels de ces amis décideront un jour de s'intéresser à votre souffrance? Ça nous est arrivé. Et c'est très, très touchant.

P.s.: chère lectrice aveuglée par les couleurs du site, j'espère que c'est mieux maintenant...

Mise à jour du lendemain: deux lectrices me rappellent que l'éloignement entre les procréateurs et les infertiles est souvent dû aux infertiles eux-mêmes. Vous avez entièrement raison. En vous lisant, je m'étonne de ne même pas avoir inclus ce point dans le post!

mardi 12 février 2008

La supervision

Vous arrive-t-il parfois de porter un jugement sur une personne qui, de toute évidence, est vraiment, mais vraiment NULLE dans son travail? Oui vous le faites. Moi aussi, et souvent ça se produit dans des situations où les conséquences sont plutôt banales: au club vidéo, avec un agent quelconque au téléphone, avec une autorité gouvernementale. Si on ne se plaignait pas d'autrui, avouons-le, on ne serait pas normal. C'est comme parler de la météo.

Donc, jugement. C'est arrivé ce matin. Et franchement, c'était un peu inquiétant.

Radio-réveil à 7h. Douche. Je prépare deux cappuccini rapides, pour emporter. La voiture est congelée. CONGELÉE. La pédale d'embrayage ne répond plus. Le volant est carré. Bref, belle matinée: à Montréal ce matin, il faisait -20 degrés Celsius. On se met en route pour l'échographie.

Une fois là-bas, tout se passe bien. L'endomètre est parfait. On nous donne la date du transfert. Re-parfait. Les embryons sont congelés, alors c'est pas compliqué.

Quelques pirouettes administratives plus tard, il nous vient à l'esprit de demander la feuille sur laquelle sont écrites les instructions pour le jour du transfert. Des trucs simples qui parlent, par exemple, de l'eau qu'il faut boire, de ce qu'il faut faire et ne pas faire après, etc. Est-ce qu'on l'a à la maison? Sais pas. Ça serait bien de l'avoir. On retourne au bureau des infirmières.

On tombe malheureusement sur celle qu'on appelle "la niaiseuse", si les lecteurs outremer me permettent cet écart de langue québécoise qu'ils comprendront très vite. Et là, ça se met à déraper.

Dialogue:
-Bonjour, est-il possible d'avoir la feuille d'instructions pour un transfert, svp?
-Heu... La feuille...? [avouez que ça commence mal]
-Pour un transfert, un transfert d'embryons congelés, en fait... Vous savez, la feuille d'instructions...?
-Pour votre Ovitrelle... pour déclencher l'ovulation?
-Non, pour le transfert.
-Ok, ben, peut-être ici... [elle ouvre un classeur qui ne contient ÉVIDEMMENT pas le genre de document qu'on veut]
-[...]
-Ok, heu, c'est pour un prélèvement d'ovules donc... [elle est vraiment bouchée, la madame]
-Non non, vous voyez, les embryons sont congelés... [On les a déjà, les ovules, niaiseuse. Si bien qu'on a réussi, par un miracle de la science moderne qu'on t'expliquera pas ici même si tu TRAVAILLES ICI, d'en prendre quelques-uns et de les fertiliser, crois-tu ça toé?]

À un certain moment, dans ces situations-là, on a une sorte de réalisation, de flashback. On s'émerveille de la quantité ahurissante d'information qu'on s'est mis à accumuler il y a un an, lorsqu'on s'est rendu à la Clinique pour notre premier rendez-vous.

Qui aurait pensé qu'on en serait rendu là, à savoir quoi demander à quel moment, à dire "Oups oups madame, il manque un truc ici...", "Oui, mais vont-ils nous rappeler", "À quelle heure au juste on prend ça? Elles ne nous l'ont pas dit..."

Vous savez ce qu'elle a fini par nous donner? La feuille pour la ponction.

dimanche 10 février 2008

L'intervention d'urgence

D'abord, un petit mot pour vous remercier -- vous savez qui vous êtes, je ne le ferai pas nom par nom, ça va finir comme aux Oscars/Césars et j'oublierai quelqu'un -- de passer par ici et de prendre le temps de lire mes niaiseries. Je l'apprécie énormément. Et ma blonde est super heureuse de voir tout ce beau monde sur le blogue.

Alors voici. Nous sommes le 10 février 2008, 22h48. Il a neigé un peu aujourd'hui, et honnêtement, l'hiver québécois commence à nous les casser un peu. Mais la neige, vous savez ce qu'elle fait? Elle porte à réfléchir.

Il y a un an, à peu près pareille date, nous sortions de notre premier rendez-vous à la Clinique d'infertilité pour une première analyse de la situation. Diagnostic: soldats paresseux, entre autres. Ça faisait plusieurs mois qu'on essayait, toujours sans résultat. En fait, aucun résultat sauf ceci: une certaine, comment dire, "mécanisation" de l'acte. Ne feignez pas la surprise, vous savez très bien ce dont il s'agit.

Pour bien comprendre, je vous livre un extrait de dialogue. Il est, disons, 23h27. Brosses-à-dents, douche rapide, heure du dodo. On travaille tôt le lendemain: voyez-vous on n'a pas d'enfant, alors on n'a pas de vie, alors en gros on s'enfonce la tête dans le boulot, un peu comme des autruches. Donc, extrait:

-Heu, chéri?
-Hmph...
-Je... Es-tu ben fatigué?
-[...]
-J'ovule.
-Ok.
-Donc y faudrait. Genre, maintenant.
-Encore? Attends, on l'a fait hier matin, donc 36 heures. Les spermatozoïdes vivent quoi, 24 à 48 heures?
-Ben, pas les tiens.
-Ouein.

Ou encore, la situation du matin. Il est 6h45. Radio-réveil qui crache des nouvelles. Ma blonde se lève. Revient au lit immédiatement.

-Heille [d'une petite voix douce].
-Hmph... [je dors]
-Y faudrait faire l'amour.
-Heeein?
-J'ovule.
-On peut pas faire ça ce soir?

Mesdames, les hommes ont beau passer pour des dérangés sexuels assoiffés d'action en tout temps, une chose est claire: une performance matinale au réveil n'entre pas nécessairement dans la catégorie "Grandes Baises de Rêve ". Ça ne paraît pas, mais certains d'entre nous aimons bien prendre un peu plus de temps. Et pourquoi pas, précéder tout ça d'un verre de vin... Mais à 6h45, avant l'autobus, les hordes de travailleurs, le boulot, le stress d'une grosse journée, disons que l'expérience est pas top sexo-romance.

C'est plutôt ce que j'appellerais une intervention d'urgence.

lundi 4 février 2008

La discipline

Disons-le sans trop faire dans les politesses : même lorsqu'on n'a pas encore d'enfant, on peut, au risque de choquer les gens qui en ont, avoir des "idées" sur des façons d'élever ledit enfant. Je sais, l'idée est farfelue. Complètement sautée, profondément troublante et probablement illégale dans certains pays.

Car tout le monde sait très bien que les gens infertiles sont, à la base, des gens qui ne savent pas vraiment comment s'y prendre. On est stressé, voyez-vous, et d'une certaine manière, on ne sait pas vivre. "Vous devriez prendre des vacances. Ma belle-soeur a essayé pendant trois siècles d'avoir un bébé. Lorsqu'elle a fait une croisière, pouf!, elle est tombée enceinte!" Ouein, tu veux savoir elle était où la croisière de ta belle-soeur, ti-coune? Dans la clinique d'infertilité à 10 minutes d'ici. Pas de goélands, mais tout aussi cher avec du café tout aussi dégueu.

Revenons à l'éducation. Pour certains dossiers -- appelons ça des dossiers, ça fait plus sérieux, après tout c'est très, très sérieux ce blogue --, ma blonde et moi avons des principes dont les modalités diffèrent un peu. L'exemple qui me vient à l'esprit: la télévision. Nous sommes les deux convaincus d'une chose: trop de télé = pas bien. Vous me dites: "Oui mais comment allez-vous transmettre ce joyeux principe à un enfant?" Vous posez vraiment d'excellentes questions, et je vous en félicite. Vous regardez sûrement des grandes entrevues quand ça passe.

Ma blonde croit dur comme fer qu'il faut limiter le plus strictement possible ce qu'elle appelle "le temps d'écran", qu'il s'agisse d'un ordinateur ou d'une télé. L'enfant doit d'abord faire ses devoirs. Ensuite, il a droit à un écran, mais seulement pour une période limitée, disons une heure. (Elle va lire ceci et pourrait me corriger sur le "disons une heure". C'est MON blogue, gna.)

Petit et adolescent, j'ai regardé des heures et des heures de télé. J'ai aussi fait du vélo, joué dans la forêt et passé des après-midi à lire des bandes dessinées. Qu'importe, j'adhère aussi au principe des devoirs avant l'écran.

Mais s'il y a limite, ou interdiction, n'y a-t-il pas le risque de créer une sorte de fruit interdit? Ou de frustrer l'enfant qui entend ses amis parler de telle ou telle émission d'hier soir sans même pouvoir en discuter lui aussi? Puisque la télé n'est pas que mauvaises téléséries, y a-t-il un risque de compromettre son processus d'identification sociale?

Je vous écris ceci et je vois, ailleurs sur le web, une quantité sidérante de théories et de conseils pour limiter le temps d'écran chez les enfants. Par exemple, on peut demander à l'enfant de prévoir à l'avance ce qu'il fera APRÈS la télé. Ou encore, une internaute écrit qu'elle a mis sur pied tout un système de coupons donnant droit, chacun, à une demi-heure de télé. Un autre site suggère une échelle de tâches ménagères dont la réalisation procure des "points", lesquels peuvent ensuite être appliqués à la télé, à l'ordinateur, etc.

Merci de passer du temps d'écran sur mon blogue.

jeudi 31 janvier 2008

Étude anthropologique

Près d'un an après notre toute première visite à la Clinique d'infertilité, on y est retourné ce matin pour une échographie et pour signer des formulaires de consentement. Ça s'est bien passé. Si tout se déroule comme prévu -- ou plutôt, comme "souhaité" -- on effectuera le transfert d'un ou deux embryons congelés d'ici deux à trois semaines.

Vous savez, la visite m'a donné l'occasion de vous observer un peu. Je parle de vous, messieurs. Vous êtes si mal à l'aise que c'en est devenu comique. Non, touchant. Et je parie qu'il y a un an, d'autres pensaient la même chose de moi.

Je peux comprendre que certains d'entre vous préférez laisser madame s'occuper de toutes les négociations médicales, de toutes ces petites choses à faire et à demander. En ce qui me concerne, l'efficacité de ma blonde est si redoutable à ce chapitre que de m'y foutre le nez plus qu'il ne faut, bien franchement, ne ferait pas avancer les choses. Alors votre silence, je concède qu'il s'explique. Mais votre manière d'être, par contre...

On se divise en quelques grandes catégories. Personnellement, j'ai été à la fois 1 (au début), 3 (honnêtement, parfois la job c'est demandant pour tout le monde, non?) et 4 (depuis un certain temps).

1-Le paniqué: il n'en croit pas ses yeux d'être là et de voir que ce matin, 13 couples souffrent du même problème, son regard est essentiellement celui d'un lièvre surpris par une voiture.

2-Le nonchalant: il n'a pas l'air de comprendre que son épouse a besoin de soutien, il passe son temps sur l'ordinateur de la salle d'attente.

3-Le pressé: emmerdé par ce rendez-vous mal foutu dans son horaire (non mais tsé, 8h15 un jeudi matin!), il vérifie son BlackBerry pour voir s'il a des courriels, n'ayant pas l'air de saisir que l'infertilité pour laquelle il consulte un médecin présente un défi plus grave que le rapport de merde qu'il doit livrer demain à son patron.

4-L'ultra cool: lui et sa blonde en sont à leur 13e visite en deux mois, une fréquence qui les a mis sur un certain niveau d'intimité avec le personnel: petits acquiescements, connaissance du prénom de telle ou telle secrétaire, "Ah bonjour!", etc.

N'oublions pas, messieurs, la plus importante catégorie (à laquelle j'ai appartenu aussi, à un certain degré):
5-Le nouveau dépositaire: il vient d'aller dans la "pièce intime" pour "faire un dépôt"; a trouvé ça plutôt agréable, ce petit moment à lui tout seul; constate, horrifié, qu'il doit faire une centaine de pas entre ladite pièce et le labo; doit croiser le regard de cinq ou six couples assis dans le couloir; doit faire comme s'y de rien n'était tout en se baladant dans un couloir de clinique avec une grosse bouteille pleine de sperme dans la main gauche; ne dira peut-être pas à sa blonde les "aides audiovisuelles" que la Clinique a installées dans la pièce pour faire en sorte qu'il soit plutôt facile d'effectuer ledit "dépôt" à des heures aussi matinales.

J'en oublie sûrement...

dimanche 27 janvier 2008

C'est un (re)départ

On l'a tous entendu, sur divers tons et dans divers contextes, parfois sur un mode moralisateur, parfois sur un mode plus neutre. "Tu vas voir, quand tu vas avoir des enfants, c'est beaucoup moins facile de [insérer quelque activité mondaine ici]" ou bien encore "Avant d'avoir ma petite fille, moi aussi je pensais ça, mais tu sais, je me dis que..."

Tsé quoi mon cher ami? On n'a peut-être pas d'enfant, mais être en traitement d'infertilité, ça veut dire que nous autres non plus, on peut pas partir demain matin pour aller dans le sud, ou un p'tit weekend de chalet à Mont-Tremblant. Le calendrier devient un casse-tête continuel. Notre temps de vacances, il s'engouffre journée par journée dans les rendez-vous à la Clinique. Notre argent, aussi...

Remarquez, ma blonde et moi sommes beaucoup, beaucoup plus équilibrés qu'il y a un an, lorsque le diagnostic est venu "changer" quelques détails de notre vie. "Quand les gens nous disent que les enfants ça change la vie", a toutefois dit ma blonde hier, "j'aurais le goût de leur dire que le fait de ne pas pouvoir en avoir, ça aussi ça change la vie."

Alors cette semaine, chères lectrices (et lecteurs!), on se remet en mode Clinique d'infertilité. Après la FIV/ICSI du début de l'hiver qui n'a pas fonctionné, on a attendu un peu. Mais! Mais on a encore quatre embryons congelés (tous des blastocystes), par paires de deux.

Si tout se déroule bien (touchons du bois), on tentera un transfert dans les prochaines semaines. Avec tout ce que ça comporte: rendez-vous, acrobaties d'horaires, un peu de stress, mais surtout... injections de progestérone intramusculaires.

Celles qui ont déjà vécu ça "savent" de quoi je parle. Malgré sa longueur (un pouce et demi) et son diamètre, la seringue dans le fessier de madame ne fait pas plus mal que les injections sous-cutanées sur le ventre. Mais la progestérone se trouve dans une huile de sésame très épaisse, ce qui rend la diffusion dans le muscle beaucoup plus longue. Ce qui, évidemment, rend l'expérience assez douloureuse lorsque, les premiers jours, on a pas encore compris qu'il serait peut-être bien de mettre un Sac Magique dans la région...

Ce que ça veut dire aussi: le retour du crayon feutre Sharpie pour bien identifier les cibles! Paraît qu'un nerf sciatique, c'est sensible.

mardi 22 janvier 2008

Projet spécial

Anecdote de travail.

Mon collègue et moi sommes convoqués dans le bureau du boss. "On a un projet spécial pour vous deux, mais faut faire vite, genre d'ici la fin de la semaine", nous annonce le boss. Gloups. Disons qu'on n'a pas le choix. Pour un paquet de raisons, dont certaines sont valables, d'autres moins.

Le boss poursuit. Il nous dit que c'est à cause de ça et ça, aussi ça, pis voyez-vous, ben, "le projet spécial qu'on va remettre à la semaine prochaine, ben, la fille qui s'en occupe est un peu surchargée ces temps-ci, on lui en a demandé beaucoup, pis elle est enceinte, alors..."

Hmph.

Le mauvais côté, c'est que, encore une fois, pas moyen de passer deux heures sans que quelque chose, quelque part nous rappelle que quelqu'un dans le coin attend un bébé pis, ben r'garde donc ça, c'est pas ta blonde! Le bon côté, c'est que c'est encore une fois la preuve qu'on a un des meilleurs boss qu'on a jamais eues au bureau. J'écris "eues" parce que c'est une femme.

Bon. Finalement le projet m'amuse, alors voilà.

samedi 19 janvier 2008

Précieux

Si l'infertilité a quelque chose de positif, c'est qu'elle nous fait comprendre très, très vite qu'un enfant, c'est précieux.

L'épisode se déroule dans un autobus. J'attends de débarquer, comme la cinquantaine de passagers. Soudain, deux voix s'élèvent derrière ma tête. Une femme en accuse une autre de l'avoir poussée. Ça crie, ça s'engueule. Ça se pousse assez violemment. À 30 centimètres, littéralement, de moi. Puis, des coups de poing. Vous avez bien lu. Je me lance dans la mêlée, leur dis que ça ne règle rien, tout ça. Comme une autre passagère, d'ailleurs. Au bout de 20 secondes, les choses se calment un peu, même si ça crie encore. Et là, je constate qu'à côté des deux femmes, il y a une jeune mère AVEC UNE POUSSETTE, qui me regarde avec des yeux plutôt incrédules.

Si j'avais vu plus tôt, j'aurais probablement eu autre chose à dire aux deux imbéciles. Il y a cinq ans, il y a un an, cette réaction n'aurait peut-être pas été la toute première sur la liste. Aujourd'hui, c'est con, mais j'aurais voulu leur faire la morale.

Autre exemple. Au bureau, il y a des fumeurs. Des gens qui se les grillent depuis 25, 30, probablement même 40 ans. Les statistiques ne mentent pas: le cancer du poumon frappent des gens qui ont 60 ans en moyenne. Pourquoi j'en parle: certains de ces collègues ont des enfants en bas âge. Et ça, si vous saviez à quel point c'est triste. Et injuste. Le p'tit gars, son papa ne le verra peut-être même pas traverser l'adolescence, c'est tout dire. Pourquoi avoir des enfants si on continue de se laisser mourir à petit feu? Oui, oui, la nicotine, je sais.

Des petites observations comme ça.

samedi 12 janvier 2008

Le dire

Au travail, les gens sont plutôt intelligents. Il y a parfois, cependant, des conversations complètement surréalistes, celles où la personne qui nous entretient sur le plaisir d'avoir des enfants aurait tellement, mais tellement honte si elle savait que la personne en face (c'est à dire votre humble serviteur) souffre d'infertilité. Conversation vécue avec un homme dans la cinquantaine.

-Alors, ta blonde, elle est revenue de ses études à l'étranger?
-Heu oui, ça fait un an et demi...
-Alors, les enfants? Vous êtes prêts, là, non? Bing bang...
-Oui oui, ça viendra...
(à ce stade-ci je commence déjà à décrocher de la conversation, et honnêtement je gagerais 10$ que mes yeux commencent à tanguer vers l'arrière. Je déteste les gens qui insistent.)
-Non mais, je te l'dis hein, n'attends pas. T'as quel âge?
-33.
-Écoute, j'ai eu les miens fin trentaine, et il vaut mieux les avoir jeune.
(il continue en disant que c'est plate d'avoir un ado en pleine forme lorsque soi-même on est un genre de vieux monsieur qui se casse des os)
-Oui oui, c'est certain...
(et là je me dis "Non mais à quoi il pense? Est-il convaincu qu'au fond, j'hésite à avoir des enfants? Ça doit être ça. Le gros préjugé du genre "T'es un gars de 33 ans pis t'as pas d'enfants, donc tu dois tripper sur ton char, c'est ça? Tu passes tes semaines à sortir pis t'es incapable de t'asseoir et de t'occuper d'un p'tit, c'est ça?")
-Tu vas voir. Quand t'as des enfants, ça te donne, comment je dirais, ça te donne une motivation additionnelle dans la vie.
(oui merci. c'est vrai qu'avec la tête que j'ai, après tout ce que j'ai fait dans ma vie, on me prend assez souvent pour un imbécile dépressif qui ne sait pas comment s'amuser dans la vie ni se motiver. Non vraiment, merci beaucoup, je l'apprécie, je n'avais jamais, mais JAMAIS!, pensé que des enfants me donnerait ce p'tit oumf qui comblerait mes heures de loisir et mon bien-être mental.)

De manière générale, il est super gentil. Mais honnêtement, ce jour-là, avec ce sujet-là, j'aurais eu le goût de lui dire tout calmement de se la fermer. Pas compliqué: lorsque tu vois, mon vieux, un gars et un fille dans la trentaine avec des bonnes jobs et pas d'enfants, généralement c'est qu'il y a un problème. Alors collègue, ferme-la, svp.

Fin de l'éditorial. Pour l'heure.

mercredi 9 janvier 2008

Le début... après deux ans

Ce blogue veut tout simplement raconter des tranches de vie... du point de vue du gars infertile. Remarquez, le point de vue n'est pas forcément différent de celui de ma blonde, mais bon, s'il y a des gars qui veulent lire un blogue, disons, écrit par un autre gars (sait-on jamais), le voici.

Quelques infos: j'habite Montréal. Et au travail, toutes les filles sont enceintes. Genre. Et parmi les amis, tout le monde a des enfants. Genre. On a appris à l'hiver 2007 que je souffre d'infertilité. Je donnerai éventuellement quelques détails. Aujourd'hui, on démarre le blogue.

Pis nous, entre-temps, disons qu'on essaie tout simplement de pas trop capoter.