lundi 28 avril 2008

Membre à vie

La vie a cette maudite habitude d'imposer à l'homme (et à la femme) une mécanique bien à elle, qu'on l'aime ou non (la vie, mais la femme aussi, non mais tsé). L'équation, que je vous résume brièvement pour éviter que vous ne vous endormiez dans les 13 prochaines secondes, ressemble à ceci: GPG=X.

Autrement dit, on passe du général (G) au particulier (P) au général (G). Le X est le résultat. Vous ne comprenez toujours pas? La plupart du temps, moi non plus. Mais je vous donne un exemple concret.

Avant-hier, nous sommes allés manger avec des amis. Ils ont un bébé d'un an. Ils ne savent pas que ma blonde est enceinte. Au préalable, je devais appeler pour fixer l'heure du rendez-vous.

Moi: Alors on se dit quoi, 11h?
Amie: Ben, quelle heure est-il, en ce moment?
Moi: 8h30.
Amie: Ok, ben en tout cas, on était debout à 6h30 hein... Alors on a l'impression d'être déjà en après-midi.

Sur le coup, je me dis que ça ne se peut pas. On ne leur a jamais dit qu'on est infertile, mais on parie assez fort qu'ils s'en doutent. Or je cherche le sens. Si le commentaire est une blague, si c'est une réflexion de nature philosophique sur l'absurdité du temps et ses conséquences sur le vivre du surmoi-- c'est sûrement pas ça, entendons-nous --, ben là je ne la comprends pas du tout.

On sait ben, quand t'as pas d'enfant, tu sors du lit le plus tard possible, t'es essentiellement une larve, vois-tu. Un parasite, voilà ce que tu es, un gros con stérile dans une société où l'absence de procréation est un non-sens, parce que le but est d'avoir des familles, de générer de la progéniture pour qu'on les entraîne à consommer des téléviseurs géants, qu'on les montre aux voisins et qu'on vogue vers le progrès, vois-tu? Alors si t'as pas d'enfant, tu te lèves tard et tu ne comprends pas, c'est tout.

Non, je vois pas.

Le pire, c'est que la veille, le gars du couple a dit quelque chose d'un peu con à ma blonde, là aussi dans la veine du "tu verras, quand tu auras des enfants".

Une fois au resto, on était tellement en crisse (désolé pour le Québécisme, les Français) qu'on leur a même pas annoncé.

Tout ça pour revenir à l'équation. La situation de départ, c'est à dire le général (G), c'est qu'on est en situation d'infertilité. Le particulier (P), c'est que la science moderne nous a permis de tomber enceinte. Or suffit d'une étincelle pour que soudainement on quitte le particulier pour prendre un peu de recul. Nous revoilà en général (G), avec une vue d'ensemble, et on se rend compte d'une chose fort simple (X): même si ta blonde est enceinte de jumeaux, tu fais encore partie du Club des infertiles, mon vieux.

lundi 14 avril 2008

Festival Sons et Lumières

La présence d'une fille enceinte dans mon entourage immédiat, nommément ma blonde, génère une quantité d'anecdotes spectaculaire, tant au chapitre des émotions (lorsqu'on a constaté, autour de la 8e semaine, qu'elle avait perdu un peu de poids) que des surprises d'ordre purement corporel (je vous laisse deviner, mais ça rime avec "omir", qui n'existe pas mais que j'utilise quand même).

Comme ce soir, par exemple. Elle arrive du travail. J'entends la porte. Je monte dans la cuisine.

-J'ai presque vomi dans l'auto.
-Hein?? Tu AS vomi? (je me vois déjà en train de passer deux heures en train de frotter le siège du passager)
-Presque.

Ou bien au moment du repas. Elle a des nausées, mais le médicament qu'elle prend depuis quelques semaines lui a redonné le goût de manger, parfois assez violemment d'ailleurs. Remarquez, le jour, je ne suis malheureusement pas là pour la voir courir au casse-croûte à toutes les demi-heures, mais je crois comprendre que ça y va par là, comme on dit au Québec.

Cet appétit renouvelé, combiné à des séances d'engouffrage (j'ai pas le dictionnaire sous la main, désolé chers puristes) de bouffe, donne lieu à toutes sortes de choses. Le plus souvent, c'est un rot, assez puissant dans la mesure où on soupçonne à travers la manifestation sonore un fond liquide.

D'ailleurs, ce soir au moment du massage après la piqûre, j'ai annoncé mes couleurs.

-Je vais faire une entrée ce soir. Ça fait longtemps. Je vais l'appeler "Festival Sons et Lumières".
-Tu devrais appeler ça "Sons et Liquides".

Et elle a souri. Elle souffre. Au moins on peut en rire un peu. J'ai bien dit "un peu". L'important, c'est que dans une semaine et demie, on sera à 12 semaines. Ce qui veut dire une chose: fini les nausées!

mercredi 2 avril 2008

L'agenda

Je n'ai pas d'agenda électronique. Plutôt, le mien est fait de papier, et un seul coup d'oeil cette semaine donne des frissons. Les journées sont bien chargées. Aujourd'hui, par exemple, j'ai eu l'impression de courir toute la journée, un peu comme une poule sans tête. Je suis rentré à la maison vers 20h30, après avoir fait des courses assez volumineuses.

Ma blonde avait déjà pris une bouchée. De plus, ses nausées l'empêchent de faire quoi que ce soit dans la cuisine. J'ai donc fait le souper -- quelque chose de sommaire, on s'entend, car les hommes sont généralement paresseux lorsqu'il faut préparer de la bouffe pour des raisons purement alimentaires, en fait ça finit souvent par être des pâtes -- et là, vers 21h58, j'ai enfin l'impression d'être bien installé dans ce qui s'apparente à une soirée... qui se terminera toutefois vers 23h15, car dodo.

On dit souvent que des journées de 25 heures seraient bien commodes pour quiconque a besoin de plus de temps libre. Les plus cyniques disent qu'elles ne feraient qu'ajouter une heure de travail, mais personnellement, j'essaierais quand même.

On dit aussi que le temps, c'est de l'argent. Si c'est le cas, je suis en faillite. Ces temps-ci, il n'y en a pas assez.

Comme on dit au Québec, j'ai un ti-peu la chienne (pour les Français: avoir peur). En fait, la chienne, non. C'est un peu fort. Disons que j'essaie d'imaginer le jour, après l'accouchement, où il y aura dans la maison non pas deux personnes, mais QUATRE. Le temps sera une denrée rare, encore plus que maintenant.

Aurai-je le temps de lire? De regarder le téléjournal? De respirer?